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30 mars 2015 1 30 /03 /mars /2015 18:25

3. Autres observations

 

Dans certains cas, l’ajout d’une virgule suffit à clarifier la phrase. La subordonnée relative est alors explicitement explicative ; on ne risquera plus de la confondre avec une déterminative, l’antécédent du pronom relatif étant clairement situé en amont :

« [O]n a préparé l’anisette [réclamée par Amanda] avec des courses, des conciliabules, des rencontres de gens qui courent sans se voir, des va-et-vient… La dame du vestiaire et un des tziganes qui a abandonné son violon s’en sont mêlés et c’est presque un petit ballet furtif et trottinant qui est souligné ironiquement par la musique sur un thème qui déforme la “valse” sans qu’on cesse de la reconnaître. » (Jean Anouilh, Léocadia, 1939, texte consulté dans Le rendez-vous de Senlis, suivi de Léocadia, Gallimard, Folio, p. 201.) C’est plus clair si la relative est mise entre deux virgules : « La dame du vestiaire et un des tziganes, qui a abandonné son violon, s’en sont mêlés ».

Dans le parc où la scène se joue, il y a des musiciens tziganes. Le déterminant utilisé (« des » = de + les) s’explique par le fait que le terme désigne des personnages qui ont été introduits plus haut, bien avant l’apparition de cette didascalie ; la relative, dont l’antécédent est donc le pronom un et non le mot tziganes, a bien une valeur explicative.

François Baillard a été arrêté et deux gendarmes veulent l’emmener en prison, mais il est si affaibli qu’un gendarme réclame pour le transporter une voiture attelée : « – […] Je n’ai pas de voiture. Voulez-vous lui en payer une ? / […] – J’en fournirais une pour trente sous, dit un des plus acharnés bourreaux qui saisit l’occasion d’un profit. » (Maurice Barrès, La colline inspirée, « Édition définitive », chapitre XIII, Plon, 1922, p. 182.) Ceux que l’auteur appelle ici les bourreaux, ce sont les villageois hostiles aux frères Baillard. De fait, on constate que Barrès omet fréquemment la virgule qui devrait précéder une relative explicative : « Dès le premier pas, le malheureux [= François Baillard] chancela et vint tomber sur la croupe de la bête qui fit tête-à-queue. » (Même page.)

Certes, le fait que « fit » soit au passé simple indique assez que les trois verbes expriment une succession linéaire d’actions. Mais si la page avait été écrite au présent, l’équivoque aurait surgi.

 

S’il n’y a pas de pronom relatif, l’ajout d’une virgule peut fournir une transition nécessaire et suffisante entre ce pluriel et le singulier des participes et des adjectifs possessifs, comme le montre ce petit extrait de dialogue (entre une certaine Mme Mopey, femme du directeur d’une compagnie d’assurances, et le célèbre détective Marshall M. Ney) :

« – C’est le plus grand cardiologue de Georgie et peut-être d’Amérique : le docteur Goods. / – Ce nom-là me dit quelque chose. Encore un de ces grands spécialistes, embusqué au fond de son laboratoire et se prenant pour le nombril de l’univers ! » (Lieutenant X [alias Vladimir Volkoff], Comment j’ai capturé un fantôme, dixième aventure de Larry J. Bash, éditions Hachette, Bibliothèque verte, 1984, p. 75.)

Dans cette phrase, la présence de l’adjectif « grands » suffit à faire du syntagme introduit par « de ces » un ensemble clos et complet. L’adjectif « embusqué », au singulier, puis le possessif « son », également au singulier, se laissent alors rattacher au pronom « un », qui précédait ce syntagme. La présence du possessif « son » nous fait entendre qu’« embusqué » est au singulier. Donc la phrase est aussi claire pour l’œil que pour l’oreille.

Comme il est naturel au sein d’un échange de propos qu’on rapporte au discours direct, le tour reflète la spontanéité de l’oral, peut-être mieux que ne le feraient ceux-ci : « Encore un de ces grands spécialistes embusqués au fond de leurs laboratoires et se prenant chacun pour le nombril de l’univers ! »

 

Les exemples qui suivent sont empruntés au Français correct de Maurice Grevisse (6e édition, revue par Michèle Lenoble-Pinson, De Boeck & Duculot, 2009, § 976, p. 338). Les commentaires seront de mon cru :

« Il répondit à un des juges qui l’interrogeaient » : la relative étant déterminative, le verbe se met au pluriel (le groupe « un des juges » est défini par le contenu de la relative placée à sa droite).

En revanche, la phrase : « Il répondit à un des juges qui l’interrogeait » doit être considérée comme incorrecte tant qu’il y manquera la virgule qui devrait précéder la subordonnée relative, cette relative étant explicative. Le groupe « les juges » a été défini précédemment, et la relative ne se rapporte qu’au pronom un.

« Je suis allé remercier un des laboureurs qui nous avait envoyé des roses » (Mauriac). J’ignore si cette phrase provient d’un roman ou d’un écrit autobiographique. Est-ce vraiment Mauriac qui a omis la virgule devant cette subordonnée relative, nécessairement explicative ? En effet, la phrase ne peut signifier qu’une chose : le locuteur (personnage d’un roman ou François Mauriac lui-même) a devant lui plusieurs laboureurs, qui travaillent peut-être sur ses terres, et que le texte a dû mentionner précédemment, mais un seul d’entre eux lui a envoyé des roses.

« J’allais justement chez une de ces femmes, qui habite rue Pauquet » (Jules Romains). La présence de la virgule rend la phrase parfaitement claire. « Ces femmes » : groupe défini plus haut dans le texte ; « qui habite » : ne se rapporte qu’au pronom une.

 

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