L’impératif tend à disparaître, remplacé par l’indicatif présent (lequel, de nos jours, se prête facilement à la vocifération) : « Kévin, tu arrêtes ton cinéma ! »
Günther Quandt s’emporte contre sa femme Magda, après qu’elle l’a trompé publiquement avec un amant très jeune. « – Dehors, hurla Quandt, dehors ! Tu sors ! Tu sors maintenant, sur-le-champ. Tu quittes ma maison pour ne plus jamais y mettre les pieds. » (Tobie Nathan, Qui a tué Arlozoroff ?, Grasset, 2010, p. 257.) Cette explosion de colère est censée avoir lieu à la fin des années 1920…
« Atlantide Sud », poème extrait d’un beau livre de Jérôme Leroy, Un dernier verre en Atlantide (la Table Ronde, 2010, p. 66), commence par ces vers : « Tu embrasses pour moi l’Atlantique / Dis-tu dans un sms / Et de ma terrasse de café à Ericeira / Je le fais / Il bleuit encore / C’est sa façon de rougir ».
J’ai relu dix fois ce début de poème avant de le comprendre. En fait, il ne faut pas construire : « Tu me dis dans un sms que tu embrasses pour moi l’Atlantique » ; mais entendre : « Embrasse pour moi l’Atlantique, (me) dis-tu dans un sms ». La femme qu’il aime, restée en France, loin de l’Atlantique, demande au poète, qui séjourne au Portugal, de donner pour elle un baiser à l’Océan. Cet usage nouveau de l’indicatif présent, exprimant, non sans ambiguïté, une invitation ou un ordre, avait dérouté ma lecture.